Montmartre, pas loin de Château Rouge.
Un quartier très bobo pas loin de mon squat de clodo.
Projection du court-métrage "Un trou dans la tête", 20 heures hier soir. Résultat ce matin : j'ai un trou dans la manche de ma veste. Que s'est-il passé entre temps ? J'ai encore la tête un peu en vrac... mais tout a fini par me revenir sous la douche (je suis un clocharistocrate, un clodo qui se lave). Après avoir visionné le petit film dans un énorme fauteuil de cuir rouge au milieu d'une salle très cosy rue Junot, j'ai mangé des petits fours salés, des petits fours sucrés, bu du vin rouge, du vin blanc et bavardé avec quelques amis et autres faux amis. Rien de bien exceptionnel si ce n'était la présence de Rona Hartner, l'actrice-chanteuse déjantée de Gadjo Dillo. Grâce à elle et à son mec (le cousin de mon-amie-Mélanie-qui-n'est-pas-une-pétasse), la soirée a pu partir en vrille. Sortis du petit cinoche, direction le bar le plus connu du coin, 100 mètres plus loin : La divette du Moulin, autrement dénommé "Chez Géraldine". Comment ? Vous ne connaissez pas Géraldine ?! Mais enfin c'est l'actrice qui a produit l'excellent court-métrage de Rodolphe Pauly ! Ah d'accord. Et puis c'est la filleule d'Alain Delon ! Aaaah ok, ok. Décidément vous n'êtes pas du quartier, ici on évolue dans le petit monde secret du cinéma, bébé. Rona chante comme une tzigane mais tout le monde dit n'importe quoi : comme une indienne, comme une berbère, comme une bulgare... pas du tout, Rona est roumaine. Son mec joue de la guitare et Seb, le pique-assiette le plus renommé de tout le festival de Cannes, fait des bruitages géniaux avec sa bouche. On poursuite la cuite au vin par une cuite à la bière. Une femme de 45 piges me raconte ses frustrations et son illumination boudhiste puis m'offre un bouquin. C'est fini, tout le monde dehors. Rona Hartner et Rodolphe Pauly hurlent : "y'a une after chez Géraldine, allez, on continue chez Géraldine". L'adresse circule de bouche à oreille, c'est juste à côté. Cette fois tout le monde est bourré. Une meute déchaînée se répand dans la rue, Rona s'arrête pour se faire pelotter par son mec, Franck Knight et Thomas sont à mes côtés... le premier veut y aller, le second a des doutes. Devant la porte on tape le code en attendant que la petite troupe reprenne corps. Tout le monde rentre d'un seul coup et s'écrase contre la deuxième porte. Bing, la vitre vient d'exploser, puis le rire de Rona, qui en rajoute à coups de coude. Ca se bouscule à nouveau dans l'ascenceur, dans l'escalier, et on y est. L'appartement n'est pas immense mais franchement classe. Franck et moi-même cherchons à boire... rien. Les gens mangent des pâtes et discutent à voix basse dans des canapés. Thomas est sorti sur le balcon et escalade la grille qui le sépare du voisin pour monter sur les toits. Je le suis. On pisse un coup en regardant Paris de haut. Attention la descente, il y a des piques sur cette putain de grille en fer. Et crac, je tombe d'un coup et me retrouve la main en l'air, accroché à la grille. Thomas a eu un peu peur pour ma main, je dois être bien saoul mais je n'ai pas de trou. Retour à l'intérieur, où une bouteille de vin trône sur le comptoir de la cuisine américaine. Vite, allons voir ça de plus près. "Vinaigre". Merde alors, j'ai failli m'en servir un verre. Un belâtre en costard attrappe la bouteille, se dirige vers Géraldine et lui propose un verre. Je me poile en tapant dans le coude de Franck : "regarde bien, on va rire". Et ça ne rate pas, "Peeeuhhhrk, quel est le con qui m'a servi du vinaigre ?!", s'étouffe la pauvre Géraldine une demie minute plus tard. Le type ne répond pas. Du coup la proprio agresse le premier venu, c'est à dire Franck. "C'est toi ?! T'es qui toi d'abord ? Qu'est-ce que tu fais chez moi ?". J'accoure pour dénoncer le vrai coupable en le pointant du doigt. Mais Géraldine fait vraiment la gueule, elle se lève, "Vous vous foutez tous de ma gueule ? Je me casse !" et elle quitte son appartement. Rodolphe continue à brailler : "QUI A MIS DU VINAIGRE DANS LE VERRE DE GERALDINE ?!", jusqu'à ce qu'il entende le maladroit se désigner lui-même. Tout le monde est très gêné. Rona range tout ce qu'elle peut et décrète que ça suffit, on ne reste pas chez quelqu'un qui n'est pas là. Chacun rentre chez soi.
Ce matin, j'ai constaté que je n'avais pas de trou dans la tête, ni même dans la main, mais un trou dans la manche.
Souvenir de la grille en fer forgé du balcon de Géraldine Danon.
Creuser le noir corporate et en faire sortir une lumière, une vérité blafarde sur tous ces suckers.