Creuser le noir corporate et en faire sortir une lumière, une vérité blafarde sur tous ces suckers.


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LE PERE NOËL nous spamme :

Le froid, l'humidité, la foule indifférente... les regards blasés,
consternés, mi-amusés ou, pire, transparents. Je me sens seul, si seul
en cette veille de Noël.
Et pourtant, le père Noël c'est moi !
J'ai commencé ma carrière au moyen âge en tant que saint Nicholas, puis
sous le pseudonyme de Santa Claus pour devenir le père Noël que vous
connaissez, je représentais quelque chose d'humain, de chaleureux, de
réconfortant, de gentil, d'honnête, de surprenant voire même de
convivial.
Aujourd'hui aussi, sauf que ce n'est plus si simple.
Noël s'est propagé à travers le monde mais s'est perdu au fil du temps.
Il a fallu "coller" à l'époque, devenir "cool" et "intéressant". Le
sourire ne suffit plus, les dents doivent être blanches, mon manteau a
pris la couleur d'une célèbre marque de boissons, je loue mon image à
d'autres firmes pour rester dans les esprits.
De recherché, je suis devenu omniprésent.
Comment faire autrement ? ce qui est à la mode se démode, je suis plus
qu'une mode pourtant. Les adultes ne voient plus en moi qu'une
résurgence ringarde de leur passé, les enfants voient avec intérêt se
profiler ma silhouette. Alors je fais un effort et je tente de
correspondre à ce que sont les valeurs d'aujourd'hui: je porte des
chaussures de sports griffées pour l'autonomie, je me maquille parce que
je le vaux bien, je suis sponsorisé par le crédit mutuel parce
qu'ensemble on est plus fort, je chatte sur le net pour le convivialité,
je mange des hamburgers pour la simplicité et je suis pro-nucléaire pour
la chaleur.
Dur.
Dur de se voir dans un miroir quand on a vendu ses rêves.
Que suis-je devenu ? un support promotionnel, ciblé sur les 6-14 et les
18-30 au second degré par des équipes marketing de jeunes loups
inconscients.
Aujourd'hui est un jour spécial, des gamins des cités ignorées, les
banlieues, m'ont coursé dans la rue. J'ai bien tenté de fuir, mais mes
responsabilités m'ont rattrapé, les enfants aussi.
Ils m'ont demandé pourquoi.
Pourquoi tu es triste ?
Pourquoi tu n'y crois plus ?
Pourquoi vivre sans rêves ?
Pourquoi vendre n'importe quoi ?
Pourquoi participer à ça ?
Que penses-tu de la phrase: "Aujourd'hui on croit que ce qui ne se vend
pas n'a pas de valeur, alors que ça n'a pas de prix !" ?
Coincé, accablé de tant de mansuétude... je craque.
Je pleure, le Père Noël pleure.
Et je parle, du monde devenu fou, des gens toujours insatisfaits, des
enfants agressifs, des marchands avides, des irresponsables qui
acceptent de n'être que des consommateurs, de l'humanité qui la perd,
justement, son humanité.
Je parle de MOI.
Car je suis cette humanité, je suis vous. Je matérialise vos centres
d'intérêts, je n'existe que parce que vous me faites exister. Et
aujourd'hui ce n'est plus une vie, c'est un suicide. Cette perspective
m'effraie, je ne voulais pas la voir en face, les enfants m'y ont
obligé.
Pourtant.
Aujourd'hui.
Le fait d'en parler, de mettre des mots sur des malaises, de partager
mes sentiments, me rend plus fort. Parce que partout des gens résistent,
vivent, rient, pleurent et s'épanouissent, je veux VIVRE.
Lorsque vous éteignez la télé et expérimentez vos capacités physiques,
émotionnelles, lorsque vous privilégiez l'échange plutôt que la
domination, lorsque votre regard brille d'ambition plutôt que de
convoitise?
Alors là, oui, je VIS.
Je redeviens ce que je n'ai jamais cessé d'être, un être humain, un
philosophe, un poète,
un ami.

A bientôt.

Le Père Noël